Échec de Mixer (Microsoft) : peut-on s’acheter une communauté en ligne ?
9 juillet 2020
Le 22 juillet, ce sera officiellement la fin pour la plateforme de jeux vidéos en streaming Mixer, lancée par Microsoft en 2016. Pour la suite de ses activités, celle-ci a conclu une alliance avec Facebook Gaming , où tous ces abonnés pourront graduellement migrer. Mais qu’est-ce qui peut expliquer la fin rapide de ce service pourtant prometteur ?
À première vue, Mixer avait plusieurs atouts pour réussir. La plateforme bénéficiait des immenses ressources financières et techniques de Microsoft, nécessaires à son développement. Elle jouissait aussi d’une technologie prometteuse (possibilité de co-streaming, délai de latence de moins d’une seconde, etc.) ainsi que de la collaboration de grandes vedettes du domaine, dont Shroud, mais surtout Tyler “Ninja” Blevins, l’une des personnalités les connues sur Twitch avec plus de 14 millions de fans.
Malgré cela, la plateforme n’a jamais pu rallier assez d’usagers pour satisfaire les attentes de ses propriétaires. Pour Phil Spencer, haut dirigeant et responsable de la division Jeux de Microsoft, Mixer a toujours traîné de la patte en termes d’usagers par rapport à ses rivaux.
Que ce soit dans le domaine de la musique ou encore de la télé en continu, le nombre d’abonnés payants est le nerf de la guerre. Ceux-ci représentent la principale source de revenus de ces plateformes, qui encourent des coûts fixes particulièrement élevés. Pensons aux budgets faramineux liés à l’achat et à la production de contenus pour la télé en continu.
Raisons de l’échec de Mixer : quelques hypothèses
Malgré une technologie prometteuse et des associations avec plusieurs grands noms du jeu vidéo en ligne, Mixer n’a jamais connu ne serait-ce qu’une fraction du succès de ses plus gros concurrents. Selon Super Data, seulement 6 % des amateurs de jeux vidéos en streaming aux États-Unis regardaient régulièrement Mixer, contre 35 % pour Twitch et 91 % pour YouTube.
Qu’est-ce qui peut expliquer la fin prématurée de Mixer ? À priori, il est fréquent qu’un géant de la techno se lance dans une nouvelle aventure risquée. Que ce soit chez Facebook, Google, Amazon ou encore Microsoft, on n’hésite pas à se lancer dans des domaines d’activités autres que celui ayant fait la réputation de l’organisation (téléphonie cellulaire, télé en continu, sites de rencontre, objets connectés, infonuagique, etc.)
Chez Microsoft, l’échec de Mixer s’ajoute à celui de Zune, un potentiel compétiteur du iPod, ou encore aux difficultés de Windows Phone, qui peine à faire sa place sur le marché des appareils intelligents. À la base, se lancer dans un nouveau créneau est toujours risqué. Le pari de Mixer ne fait pas exception.
Un autre facteur d’échec, selon plusieurs experts du domaine, est qu’on ne peut »s’acheter une communauté en ligne ». En accordant de lucratifs contrats à des joueurs comme Shroud et Ninja, Microsoft espérait attirer leur vaste communauté de millions d’adeptes. Ces derniers sont venus pour les voir sur Mixer mais ne sont pas restés fidèles à la plateforme.
En effet, l’histoire récente montre effectivement que de telles communautés en ligne se bâtissent petit à petit. Il faut se définir une personnalité, une identité propre. Une page Facebook ne se bâtit pas à coups de concours et de publications payantes, tout comme un nouveau réseau social, peu importe les ressources dont il dispose, ne prendra pas son envol s’il offre une expérience similaire à celle de ses rivaux.