L’intelligence artificielle ne remplacera pas les recruteurs (TruMontréal)
Le sujet semble inévitable. L’IA apparaît sur toutes les lèvres en ce moment. TruMontréal, qui rassemblait une importante communauté de recruteurs le 6 novembre dernier, en traitait à son tour.
14 novembre 2017
L’intelligence artificielle ne prendra pas la place des responsables des ressources humaines. Elle les appuiera en abattant des tâches routinières et répétitives à leur place. Ils pourront ainsi passer plus de temps avec les candidats. Voilà qui repositionnera l’humain au centre de tout, ainsi que le confirmait le premier compte-rendu  d’Isarta Infos sur l’incontournable «non-conférence RH».
L’automatisation
Marie-Ève Bernard, qui animait l’atelier Intelligence Artificielle en deux parties dans le cadre de TruMontréal, affirmait:
L’IA n’a pas d’émotions, elle fait des tâches répétitives.»
Par définition, cette notion qui semble futuriste pour plusieurs, se résume en un ensemble de théories et de techniques de machines qui simulent l’intelligence des hommes. Au fond, l’IA consiste en une série de formules mathématiques, basées sur des algorithmes et l’apprentissage automatique (machine learning).
Dans le monde du recrutement, les avancées numériques permettront surtout d’automatiser certaines activités récurrentes et d’augmenter le volume des données recueillies.
Le traitement de données
Le principal défi des entreprises actuelles, selon Madame Bernard, reste de posséder des mégadonnées de qualité. On doit éviter les doublons, les éléments qui n’ont plus de sens, la multiplication des supports.
Aujourd’hui, les données doivent être clean», précisait-elle.
L’oratrice mentionnait également:
Au début, 80 % du travail de l’intelligence artificielle consistera à nettoyer ces données.»
Les assistants virtuels
En poussant plus loin, dans la voie de l’apprentissage automatique, l’algorithme implanté dans votre organisation pourra apprendre par lui-même. Son système entrera même des informations auxquelles vous n’avez pas pensé.
Concrètement, l’intelligence artificielle s’installera sous forme de traitement du langage naturel. Par exemple, des chatbots répondront aux questions des candidats et employés pour vous. Plus votre robot analysera de demandes, plus il s’avèrera pertinent dans ses réponses.
Certains logiciels peuvent répondre à 10 000 personnes en même temps. Donc, chaque candidat reçoit une réponse, et vous passez plus de temps en personne avec les employés potentiels de votre entreprise.»
Le «match parfait»
Des programmes d’intelligence artificielle effectueront aussi pour vous un premier tri de CV, minimisant les oublis et vous offrant l’accès en priorité à ceux qui correspondent le plus à vos critères. Ainsi, vous aurez plus de plages horaires disponibles pour vous occuper de la gestion «humaine» des ressources.
Vous éviterez de surcroît un plus grand nombre de biais cognitifs (pourvu que le programmeur n’en ait pas introduit dans vos outils). Vous aurez même des options favorisant la neutralité, applicables dans votre processus de sélection, comme la possibilité de masquer les noms et les photos des profils des candidats.
La détection des émotions
Dans un futur plus lointain, peut-être les départements de ressources humaines en viendront tous à intégrer des fonctions intelligentes d’analyse des sentiments. Elles détermineraient alors la subjectivité d’un discours parlé ou écrit. Même si des indices supplémentaires sont révélés quant au degré de motivation d’un candidat, son état intérieur ou sa sincérité, on aura toujours besoin d’un humain derrière pour prendre une décision.
L’intelligence artificielle imite le génie humain, mais reste mécanique. Cela met encore plus en lumière l’importance des qualités premières des recruteurs.
Ce que ça va prendre à nos enfants dans le futur pour se démarquer, c’est l’empathie, la capacité à tisser des liens avec autrui, l’émotion», soulignait Marie-Ève Bernard.
Les bouleversements à venir
D’accord, le recrutement, lui, se montre très humain, selon Madame Bernard. Cela ne signifie pas pour autant que tous les métiers seront épargnés. Céline Raguette et Laetitia Robillard le démontraient à travers l’atelier Recruteur de demain: un chimiste d’influence.
Des métiers disparaissent, d’autres se transforment, d’autres se créent», disaient-elles.
Les deux expertes en la matière affirmaient études à l’appui que:
- 75 % des emplois vont évoluer
- 12 % vont disparaître
- 13 % vont naître
Les grands groupes de professions
Pour bien comprendre qui sera affecté par les transformations attribuables à  l’IA, on peut diviser les postes en grandes catégories:
- routinier/manuel
- routinier/intellectuel
- non routinier/manuel
- non routinier/intellectuel
Bien sûr, le contexte dans lequel s’inscrit une fonction demeure important. Un métier risque d’occuper différentes cases selon la façon dont il est effectué.
Les exercices guidés par Madame Raguette et Madame Robillard démontraient principalement que les emplois se créent du côté des non routiniers/ intellectuels.
Voilà pourquoi les chasseurs de têtes et recruteurs sont épargnés. Oui, les tâches routinières d’analyse de données qu’ils exécutent chaque jours seront comblées par l’IA, mais leur créativité sera mise à contribution, en faisant des «non routiniers/intellectuels».
Où se trouve la menace?
Les domaines amenés à disparaître se situent donc surtout du côté des routiniers intellectuels.
Partout où l’IA grandit, l’intervention de l’homme diminue», lançaient les animatrices.
Il en va donc de la responsabilité des intervenants en matière de ressources humaines de guider leurs collègues et leurs entreprises.
Sachant cela, on regarde l’organisation et on voit si nos emplois se situent là , et on pense à comment on doit coacher les gestionnaires en ce qui concerne les nouveaux métiers», disait Céline.
Posez-vous des questions, suggérait Laetitia:
- Quel est le pourcentage d’emplois visés dans mon organisation?
- Sommes-nous prêts?
- De quelle façon les métiers vont changer?
La responsabilité des recruteurs
L’intelligence artificielle ne remplacera pas les responsables des ressources humaines. Par contre, elle entraînera la disparition d’autres postes. Elle amènera également des remaniements importants dans certains secteurs. Comme les recruteurs se veulent en contact direct avec toutes les équipes, ils doivent assumer leur rôle d’agent de changement et d’influenceur au sein de leur organisation.
Recruteurs, vous êtes des bâtisseurs de ponts, rappelait TruMontréal. À l’ère de l’IA, vous avez une opportunité de vous asseoir à la table des décideurs et de jouer votre rôle-conseil.
Crédit photo: TruMontréal