Cargué dans ma chaise sur LinkedIn

Est-ce en raison des nouvelles fonctionnalités de publication mises en ligne en janvier dernier, les conversations LinkedIn deviennent de plus en plus conviviales. Si bien qu’on se croirait sur Facebook! Analyse.

27 juin 2017

Le 19 janvier dernier, LinkedIn a lancé de nouvelles fonctionnalités (dont un fil d’actualité semblable à celui de Facebook) avec l’intention déclarée de «mettre les conversations et le contenu au centre» de son interface. Depuis, on a la nette impression que les cravates se dénouent et que les esprits se désinhibent.

La campagne électorale française en a donné un bel exemple — pour qui a des contacts LinkedIn dans l’Hexagone. Plusieurs professionnels ne se sont pas gênés pour afficher leurs couleurs dans des posts ou des commentaires. Prenons cet appel au Parti socialiste à «retirer son candidat pour faire barrage au Front national dès le premier tour», publié par un consultant RH, une prise de position peu probable il y a quelques mois seulement.

Au Québec, Michelle Blanc s’est récemment fait reprocher un mauvais usage de LinkedIn, parce qu’elle avait parlé de ses 23 ans de vie de couple avec sa «fabuleuse Bibitte Électrique». LinkedIn n’est pas Facebook, s’est-on empressé de lui dire. Ce à quoi elle a répondu:

Pis après? Pourquoi prendre la peine de venir sur mon mur LinkedIn pour me dire ça? Faut croire que ça te dérange? Pis justement, c’est une maudite bonne chose. Tu ne deviendras jamais mon client. C’est une forme de sélection naturelle. Les téteux constipés ne fitteraient pas avec moi.»

Ouch.

La consultante admet que les deux médias ont des vocations différentes; et qu’elle-même fait des choix éditoriaux en sélectionnant du contenu destiné à Facebook («des photos de pizza, de lac ou de ma chienne Charlotte» cite-t-elle en exemple) et d’autre à LinkedIn.

Sauf que la ligne devient mince, semble-t-il.

En fait, même les conversations qui demeurent dans la sphère professionnelle prennent désormais des tournures indiscrètes: des travailleurs demandent conseil sur leur prochain move professionnel, des employeurs s’épanchent sur le travail bâclé d’un fournisseur ou d’un employeur. Des entrepreneurs racontent leurs déboires en affaires et tentent d’en dégager des leçons. À lire à cet égard le récit doux-amer du fondateur de l’agence Commun, Martin Ouellette, titré «Ce que j’ai appris en 16 ans».

Le point de vue d’un consultant Web

Sur un média comme LinkedIn, c’est normal que les gens cherchent à se démarquer, lance François Jacob, consultant Web et formateur en médias sociaux. Il y a toutefois une limite de bon goût à respecter. En ce qui concerne LinkedIn, plus particulièrement, je conseille aux gens de circonscrire leurs interventions à la sphère professionnelle et à leur champ d’expertise.»

Que pense le consultant des gens qui lancent des polémiques, demandent des conseils ou racontent un épisode de leur vie professionnelle? L’idée n’est pas mauvaise en soi:

Un média social est fait pour véhiculer notre identité. Ça reste une place où il faut que ça vive. Sinon, on reste dans l’autopromotion. Toutefois, je constate que les gens sous-utilisent les groupes de discussion. Ils auraient intérêt à se tourner vers ces groupes plutôt que le fil d’actualité pour lancer une conversation. Tu t’adresses ainsi à des professionnels de ton milieu. C’est beaucoup plus pertinent.»

De manière générale, François Jacob voit dans le réchauffement des conversations LinkedIn une démocratisation inévitable et pas mauvaise en soi de ce média de réseautage professionnel:

Plus il y a de monde qui utilise un média, plus le risque est grand qu’une certaine frange ne respecte pas le code de base de ce média. C’est pourquoi on y retrouve toute sorte de contenu, dont des publications moins pertinentes sur le bonheur ou des quiz mathématiques…»

L’algorithme du fil d’actualité devrait toutefois s’ajuster en fonction de nos habitudes de navigation et de nos contacts, précise-t-il.

* Cargué dans ma chaise est le titre d’une chanson du groupe acadien Radio Radio.

La formation en lien avec le sujet:

Gestion de communauté: Twitter, Instagram, Pinterest, Linked In et Snapchat