« Chez Éthiquable, on retrouve des personnes qui veulent trouver un sens à leur travail »
Isarta Infos qui s’intéresse à la culture d’entreprise, la marque employeur et les besoins de recrutement de différentes sociétés, tous secteurs confondus. Aujourd’hui, nous sommes avec Éthiquable, l’entreprise coopérative française spécialisée dans la vente de produits bio issus du commerce équitable.
De Éthiquable, on connaît surtout le café, le thé ou encore le chocolat. Mais la société, créée en 2003, commercialise plus d’une centaine de produits et affiche un chiffre d’affaires de 51 millions d’euros, en croissance de +28 % par rapport à l’an passé.
Rencontre avec l’un des cofondateurs, Rémi Roux, qui nous parle des coulisses de son entreprise.
Pour commencer, pouvez-vous nous présenter brièvement Éthiquable ?
Rémi Roux : Nous fabriquons des produits bio issus du commerce équitable en achetant à un prix plus juste les matières premières et les produits, à des coopératives de petits producteurs. On considère en effet le commerce équitable comme un outil de développement.
On est aujourd’hui 103 salariés répartis entre un bureau à Paris, où se trouve la R&D et la communication, et un autre dans le Gers. Dans ce dernier, on a l’entrepôt, la comptabilité ou encore le service commercial. On a aussi des agronomes un peu partout dans le monde : à Madagascar, en Équateur et au Pérou.
Vous êtes une SCOP (société coopérative et participative). Comment cela fonctionne-t-il concrètement en interne ?
R.R : Une SCOP est en effet une entreprise qui appartient à ses salariés. Concrètement, cela veut dire que les associés salariés votent de manière démocratique les grandes décisions. Une personne a une voix, contrairement à une entreprise classique où la personne qui détient 51 % du capital peut décider de tout. D’ailleurs, on a eu notre Assemblée Générale il y a quelques jours et j’ai été réélu gérant pour 3 ans.
On a aujourd’hui 70 salariés qui sont sociétaires. C’est écrit dans nos statuts : tous les salariés doivent devenir actionnaire, c’est écrit sur leur contrat de travail, au bout de 2 ans d’ancienneté. Ces derniers ont donc deux casquettes : d’un côté, ils sont salariés et de l’autre, ils cotisent 3% de leur salaire pour être actionnaire de la SCOP, on dit sociétaire. Ce qui leur donne une voix en assemblée générale.
Et en cas de départ ?
R.R : Ils récupèrent l’argent qu’ils ont mis. Il n’y a pas de spéculation sur les parts sociales. L’action vaut 20 euros. Pendant le temps où ils sont là , ils vont cotiser 3 % de leur salaire pour acquérir des parts sociales et le jour où ils repartent, on leur redonne ce qu’ils ont versé.
Ils ne peuvent pas les revendre à l’extérieur. C’est pour ça qu’une SCOP ne peut pas être rachetée. Et c’est aussi pour cela qu’on est un des seuls acteurs dans le domaine à rester indépendant.
Quel est l’avantage de ce fonctionnement selon vous ?
R.R : La SCOP, c’est un outil de travail qui appartient aux salariés. Contrairement à des boîtes classiques qui appartiennent à des investisseurs qui n’y travaillent pas toujours. Ce n’est pas la même philosophie : les salariés participent ainsi aux grandes décisions de l’entreprise.
Après, au quotidien, on fonctionne comme une entreprise traditionnelle. Il y a des chefs de service, si quelqu’un ne fait pas son travail ou s’il vole ou je ne sais quoi, il peut être licencié. Même s’il est sociétaire.
Par ailleurs, on est agréé entreprise solidaire comme on oeuvre dans le commerce équitable. Chez nous, il y a peu d’écart de salaire : le ratio entre le plus bas et le plus haut va de 1 à 4. Le salaire le plus bas, c’est SMIC + 15 %. Pour celui des fondateurs, il suffit de multiplier par 4 ! Cela a été voté en assemblée générale.
Avez-vous d’autres initiatives pour engager vos salariés ?
R.R : Il faut aussi voir que, s’il y a des résultats positifs, ils sont répartis en grande partie entre les salariés. 50 % des bénéfices vont en réserve, pour fortifier la SCOP, et l’autre moitié est partagée entre les salariés en participation aux bénéfices.
Pour que tous les salariés puissent bien comprendre ce qu’on fait, au bout de deux ans d’ancienneté, on les envoie également dans les pays du sud pour rencontrer des coopératives, une dizaine de jours.
Par exemple, en juillet, il y a 8 salariés qui partent au Pérou pour aller visiter 5 ou 6 coopératives et c’est Éthiquable qui prend en charge ce voyage. Tous les salariés sans exception.
On organise aussi, deux fois par an, fin août et début janvier, souvent à Fleurance, nos ateliers d’été. C’est l’occasion de regrouper toute la SCOP et on a 2 jours de réunions sur les nouveaux produits, les nouvelles orientations, la stratégie etc. Ça permet à tout le monde de se voir physiquement.
Il faut bien comprendre que, en général, chez Éthiquable, on retrouve des personnes qui veulent trouver un sens à leur travail, pour qui le commerce équitable est important.
Pouvez-vous nous parler de vos besoins de recrutement à venir ?
R.R : Cette année, on a prévu de recruter 6 personnes. Notamment une personne au service qualité à Fleurance, deux commerciaux supplémentaires ou encore un responsable de production à Bordeaux pour la torréfaction du café.
Comme dans les autres entreprises, on va chercher des compétences sur le métier pour lequel on recrute. Parfois, comme pour le poste de commercial, on recherche aussi beaucoup un savoir-être. Si la personne a déjà travaillé en grande distribution c’est un plus, mais dans notre équipe de vente, on a des gens qui n’avaient jamais fait commerciaux avant et à qui on a appris le métier.
On va aussi chercher des gens qui ont envie de travailler dans le projet. On va éviter les gens qui cherchent juste un salaire. De toute façon, on n’est pas mieux payé que dans les autres boîtes ici.
Comment se passe le processus de sélection ?
R.R :Â Tout d’abord, on met des annonces sur des sites comme l’APEC. On ne passe pas par des cabinets de recrutement.
Au début, les trois fondateurs s’occupaient eux-mêmes du recrutement. On recevait les candidats et on se mettait f’accord.
Mais depuis plusieurs années, on a délégué les recrutements. On vient d’ailleurs de recruter une responsable RH. On avait toujours dit : quand on arrivera à 100 personnes, il faudra qu’on le fasse… et ce fut en effet la 100e salariée en novembre ! On est donc en train de faire évoluer le processus avec elle.