« Employés boomerang » : Les vertus de ces salariés qui reviennent au bercail
25 septembre 2025
Dans une étude récente, l’entreprise de gestion de la paie ADP a montré que l’embauche « d’employés boomerang » (partis puis revenus dans leur entreprise) était en hausse constante depuis 3 ans, passant de 26% des nouvelles embauches en 2022 à 35% en 2025. Nous avons voulu mieux comprendre le phénomène en parlant à des professionnels qui ont fait le choix d’un retour au bercail.
En 2020, Julien-Pierre Boisvert a accepté une offre d’embauche de son ancien employeur AppDirect, où il avait été recruteur technique de 2016 à 2017. Il y est retourné à titre de directeur senior de l’acquisition de talent. Pourquoi ce retour au bercail?
À l’époque où j’ai quitté, le leadership de l’entreprise était très centralisé aux États-Unis. Or, avec la mondialisation des talents et la pandémie, AppDirect – comme plusieurs autres entreprises – a commencé à bâtir son leadership en dehors des grands centres habituels, comme San Francisco ou New York. Un recruteur d’AppDirect m’a contacté et m’a offert un poste de directeur, » explique-t-il.
Julien-Pierre Boisvert n’a pas hésité à dire oui. « J’aimais l’entreprise et sa culture», s’enthousiasme-t-il. En tant que directeur du recrutement, il connaît désormais les deux facettes de la médaille, puisque l’entreprise a un programme de recrutement des employés boomerang. Le directeur nous en explique les vertus pour l’employé et pour l’employeur :
Premièrement, l’employé connaît déjà le produit, les clients, la structure et la culture de l’entreprise. Il n’a pas besoin d’être « rééduqué ». L’entrée en poste se fait beaucoup plus rapidement. Ensuite, ça change complètement la perspective de l’employé. Quand les choses deviennent plus difficiles, il a moins le réflexe de se dire que ‘le gazon est plus vert ailleurs’. Il est déjà parti une fois. Il est revenu en toute connaissance de cause. »
Pour convaincre un ancien employé de revenir au bercail, Julien-Pierre Boisvert voit un ingrédient essentiel à mettre en place : faire de bonnes interviews de départ, pour comprendre les raisons qui ont amené une personne à quitter. Ensuite, il est important d’être très transparent dans la démarche de séduction.
Quand on approche un ancien employé, nous commençons par lui parler des enjeux actuels, et surtout, quelles sont les différences principales depuis son départ. On va aborder tous les points de friction, puis nous allons expliquer comment nous voyons la réintégration dans l’organisation dans son nouveau rôle, » énumère-t-il.
Retourner au bercail, « un tournant dans ma carrière »
Lorsque le Français Gaudérique Traub est arrivé au Québec en 2018, il a eu une brève première expérience de travail à titre de consultant au Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec (RJCCQ). Un poste « junior, avec des responsabilités multiples, souvent subalternes et un salaire modeste », décrit-il.
J’ai quitté ce poste, car je cherchais à acquérir des compétences plus proches de mon métier en relation publique au sein d’une grande structure. Une opportunité s’est présentée au sein du service de développement économique de la Ville de Montréal, pour contribuer au développement du réseau PME MTL. Ce poste m’a permis de développer une expérience plus structurante et d’élargir mon réseau », continue-t-il.
Quelques années plus tard, il a eu l’opportunité de retourner au RJCCQ, en prenant quelques galons au passage.
Je suis revenu avec un bagage enrichi : une meilleure compréhension des enjeux publics, un solide réseau de contacts dans les milieux économiques et politiques, ainsi qu’un ancrage professionnel plus fort. On m’a proposé un poste senior de Directeur Affaires publiques et Relations gouvernementales, avec une latitude stratégique et une reconnaissance salariale ajustée ».
Gaudérique Traub voit plusieurs vertus à un retour aux sources chez un ancien employeur.
Revenir dans une organisation a été un tournant dans ma carrière. Cette décision m’a permis de franchir un cap professionnel, tout en apportant à l’organisation un regard neuf, un réseau élargi et une compréhension affinée de ses valeurs et de ses rouages internes. Ce retour n’était pas un simple retour en arrière. Il s’est accompagné d’un changement d’état d’esprit : je ne me percevais plus seulement comme un employé, mais comme un collaborateur stratégique. Et j’étais perçu comme tel. Cette reconnaissance a instauré une relation plus équilibrée avec l’employeur fondée sur la réciprocité et la confiance.»
Plus largement, Gaudérique Traub est convaincu que les employés boomerangs enrichissent les pratiques internes. De plus, leur connaissance préalable de l’entreprise facilite leur réintégration. Et leur présence souvent plus proactive les positionne dans les équipes comme des pairs crédibles et inspirants auprès de leurs collègues.
Cette dynamique invite aussi à revoir la façon dont on gère les départs, ajoute-t-il. Un employé qui part aujourd’hui peut devenir demain un ambassadeur ou un partenaire riche d’expériences. Il est temps de les considérer non plus comme de simples « ressources humaines », mais comme des alliés potentiels à long terme, voire comme de futurs clients. »
formations.isarta.com A propos de l'auteur
