Le difficile équilibre entre les besoins d’une équipe… et ceux d’un individu!
8 avril 2024
Faut-il viser le bien-être collectif ou le bien-être individuel ? Une étude récente provenant de Finlande montre que, au travail, les stratégies d’adaptation collective et individuelle peuvent parfois entrer en conflit. Explications.
L’histoire m’a été racontée par une amie programmeuse. Croyant agir pour le bien-être de ses employés, la firme d’informatique qui l’embauchait à l’époque avait organisé des séances collectives de crossfit. Tous y participaient, peu importe l’état de forme ou de santé des employés… Ce qui a eu l’effet de mobiliser les adeptes de ce sport, tout en s’aliénant les gens sédentaires et peu en forme.
L’anecdote montre comment la bonne intention d’un employeur peut rapidement dérailler sur le terrain. Plus largement, elle révèle qu’il y a un équilibre à atteindre entre les stratégies « collectives » et les stratégies « individuelles » d’adaptation au changement. C’est d’ailleurs ce que montre une étude publiée en février 2024.
En début de pandémie, l’équipe de recherche de l’université d’Aalto en Finlande a observé 12 équipes de travail – totalisant 69 membres, chacun tenant un journal quotidien – forcées de passer en télétravail. L’objectif : mieux comprendre l’impact des stratégies d’adaptation collective sur les individus, et vice versa.
Pendant que les recherches passées sur les stratégies d’adaptation collective ont identifié plusieurs actions prises par des groupes pour s’adapter à des stresseurs communs, elles ont largement négligé d’explorer comment des individus avec des perceptions différentes d’une même situation stressante peuvent s’unir et former une compréhension commune des stratégies d’adaptation requises, » est-il ainsi affirmé.
Le « paradoxe du bien-être multiniveau »
L’idée peut sembler théorique, mais l’étude donne des exemples simples. Au début de la pandémie, plusieurs organisations ont planifié des pauses virtuelles communes, afin de solidifier les liens entre les membres d’une équipe, de rendre la circulation de l’information plus fluide et de briser l’isolement. Or, ces rencontres étaient parfois monopolisées par quelques employés bavards, et donc, les employés les plus introvertis ont fini par développer une perception négative de ces rencontres. Pour se ressourcer, un employé peut avoir besoin de socialiser, alors qu’un autre, de déconnecter. Ainsi va la vie.
Nos recherches montrent comment les besoins et les efforts d’adaptation des équipes et des individus peuvent parfois entrer en conflit, résultant dans des états de bien-être opposés à différents niveaux [individuel ou collectif]. Nous avons appelé ce phénomène : le paradoxe du bien-être multiniveau, » écrivent les chercheurs.
Pour atténuer les frictions entre les stratégies collectives et les stratégies individuelles, l’équipe de recherche met de l’avant la notion de «perception commune» (shared appraisal) des stresseurs en jeu :
Notre modèle émergent de stratégie d’adaptation multiniveau en équipe suggère que les équipes performent quand elles partagent une perception commune des stresseurs et des options d’adaptation à travers une réflexion active en équipe. Et quand elles adoptent des stratégies d’adaptation qui s’alignent avec les stresseurs spécifiques vécus par chacun, tant au niveau individuel que collectif. »
Concrètement, l’équipe de recherche propose qu’une équipe se rencontre à intervalle régulier pour discuter des résultats obtenus par les stratégies d’adaptation individuelle et collective. Dans ces rencontres, les employés sont invités à nommer et s’entendre sur des stresseurs collectifs (ex : difficulté de communiquer à distance), puis de nommer des solutions.
Chacun nomme ensuite ses stresseurs individuels (ex : la difficulté de se doter d’une routine à la maison). Et une priorisation des stratégies d’adaptation est faite, à la lumière de ces partages.
La démarche est shématisée ici :
Le point de départ : planifier une première rencontre, et discuter des stresseurs de chacun!
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