Les brainstorming créatifs à distance n’ont pas forcément que des défauts selon des chercheurs
1er octobre 2022
Les chercheurs de la revue Nature ont voulu savoir si les brainstorming créatifs étaient réellement plus efficaces en personne qu’à distance, comme le soutiennent plusieurs agences créatives. Leur étude, publiée en avril dernier, offre une conclusion en demie teinte : si le mode présentiel permet de générer un plus grand nombre d’idées créatives, notre habilité à en évaluer la qualité serait supérieure… en virtuel. Explications.
Un peu plus tôt cette année, les chercheurs en marketing Mélanie S. Bruck, de l’Université de Columbia, et Jonathan Levav, de l’Université de Stanford, ont recruté 602 personnes pour participer à deux sessions distinctes de remue-méninges créatif visant à imaginer des utilisations pour deux produits, soit un frisbee et du papier bulle.
Par équipe de deux, les participants avaient 5 minutes pour trouver des utilisations, puis une minute pour sélectionner leurs meilleures idées. La moitié des équipes collaboraient à distance; l’autre moitié, en personne, physiquement.
Nous avons montré que les interactions virtuelles entravaient la génération d’idées, annoncent les chercheurs, dans le résumé de leur étude. Nous avons trouvé que les équipes en vidéoconférence généraient moins d’idées créatives que les équipes en personne, en raison de la concentration visuelle, mais nous n’avons trouvé aucune preuve que les groupes en vidéoconférence étaient moins efficaces pour sélectionner les meilleures idées.
Les chercheurs font remarquer que, même si la même information est échangée, il subsiste une différence physique «inhérente» à communiquer par vidéoconférence; une différence qui est «psychologiquement significative». Le fait de partager une pièce commune complète plutôt qu’un minuscule écran a un impact sur le résultat des échanges, font-ils valoir.
Moins de vagabondage de l’esprit
Nos données suggèrent que cette différence physique dans les espaces partagés force les communicateurs virtuels à limiter leur champ visuel en se concentrant principalement sur l’écran, et, par conséquent, à filtrer les stimuli périphériques qui ne sont pas visibles ou pertinents pour leur partenaire.
Par une analyse faciale, les chercheurs ont en effet découvert que les gens en remue-méninges virtuels avaient moins tendance à laisser leur regard vagabonder dans la pièce. Et aussi, que ce vagabondage était associé à une plus grande génération d’idées.
Ensuite, les chercheurs suggèrent que les échanges à distance perdent en fluidité.
Le nombre de mots prononcés n’est pas significativement différent, précisent-ils. Toutefois, les groupes virtuels s’échangent moins souvent la parole et il y a beaucoup moins de «répliques» ou d’interruption.
Dans un deuxième temps, les participants devaient sélectionner les meilleures idées générées pendant la séance de remue-méninges. C’est ici que les résultats de l’étude ont de quoi surprendre. Les chercheurs en marketing notent que les équipes virtuelles ont sélectionné des idées de meilleure qualité, mais ils n’offrent pas vraiment d’explication à ce qu’ils observent.
Or, on peut se rappeler que les remue-méninges ont le défaut d’ouvrir la porte à la pensée de groupe; en personne, les gens ont parfois tendance à s’autocensurer, pour ne pas déplaire à la personne ou aux personnes devant eux. Les échanges virtuels donnent peut-être un peu plus de recul, pour juger d’une bonne idée ? C’est une hypothèse comme une autre.
Impact sur les politiques de télétravail
Dans leur étude, les chercheurs rappellent qu’il existe une multitude de raisons pour choisir de collaborer en personne ou à distance, incluant les économies d’échelle sur la location de bureau, l’accès à des talents dans des régions éloignées, et ainsi de suite.
Pour avoir le meilleur des deux mondes, concluent les chercheurs, plusieurs entreprises ont mis en place – ou projettent de le faire – une politique de télétravail qui combine des interactions virtuelles et en personne.»
De quoi faire réfléchir !