De plus en plus d’employé·es se rendent compte que l’herbe n’est pas forcément plus verte ailleurs
19 octobre 2022
L’été dernier, l’humeur des travailleurs était à la rébellion pur et simple. Un sondage de Monster portait le nombre d’employés désirant changer d’emploi à un taux astronomique de 95%. Or, un an plus tard, en juillet 2022, voilà qu’une enquête d’APD nous apprend que 93% se disent « heureux dans leur rôle ». Pardon? Re-pardon? Après deux ans et demi de pandémie, une inflation galopante et maintenant, le spectre d’une récession, l’humeur des travailleurs est à la fois volatile… et terriblement difficile à comprendre.
Comment interpréter ce retournement de situation? Tout d’abord, il semble que le syndrome du « plus vert chez le voisin » ait sa part à jouer, comme nous l’avions prédit dans un article de l’été passé. Dans un sondage effectué par The Muse mené de 2 500 travailleurs qui ont changé d’emploi, on apprend que 72% d’entre eux ont été «surpris» de découvrir que leur nouveau poste soit «très différent» de ce qu’ils avaient imaginé. De ce nombre, près de la moitié (48%) reprendraient leur ancien emploi si l’occasion leur était offerte.
Dans le même esprit, un sondage mené en juin par Harris Poll révèle qu’environ 20% des transfuges des deux dernières années «regrettent» avoir changé d’emploi. Tristement, seuls un quart d’entre eux (26%) disent aimer suffisamment leur emploi pour le garder.
Est-ce que tous ces travailleurs quittant leur emploi pour un nouveau en trouvent vraiment un bien meilleur que leur ancien? demande l’entrepreneur et chroniqueur Dominic Gagnon. Est-ce que leur nouvel employeur est bien meilleur que celui d’avant? Ou est-il possible que Roland accepte un nouvel emploi qui remplace Stéphanie, qui a quitté cet emploi pour la même raison que Roland quitte son emploi? »
Le dirigeant de Connect&GO met ce jeu de chaise sur le compte d’une pandémie qui a engendré «des attentes irréalistes», en cultivant un discours selon lequel «il y a toujours quelque chose de mieux ailleurs — un rôle plus épanouissant, un salaire beaucoup plus élevé, une plus grande flexibilité»… Si l’hypothèse est exacte, c’est aujourd’hui toute une cohorte de travailleurs qui s’apprêtent à frapper un mur. Celui du retour partiel au bureau. Et aussi, dans une certaine mesure, celui du retour à la réalité d’avant pandémie.
Des employeurs… à l’écoute malgré tout
Il s’agit d’une hypothèse, évidemment. Car, à terme, il n’est pas impossible que les entreprises se mettent réellement à l’écoute des travailleurs et mettent leur bien-être en priorité. En 2021, un sondage de Willis Towers Watson annonçait que 95% des employeurs plaçaient «l’amélioration de l’expérience employé» en tête de leurs priorités organisationnelles. Peut-être tiendront-ils promesse.
Aussi, il faut savoir que le facteur le plus déterminant pour changer d’emploi n’est pas d’obtenir plus de flexibilité ou un meilleur équilibre travail-famille, mais faire plus d’argent. C’est ce qu’ont répondu 88% de ceux qui considéraient passer chez un compétiteur, dans le sondage de la firme ADP.
Et les employeurs semblent bien au fait de cette situation; dans le même sondage, 27% des travailleurs affirmaient avoir reçu une augmentation «non liée à leur rendement». Une augmentation sans doute la bienvenue, en cette période d’inflation… et de possible récession!