Transition d’employé à manager : comment faire le deuil du patron « qu’on voulait être » ?
28 mai 2020
Comme employé, on a tous une petite idée du patron « que l’on serait » si on accédait aux plus hautes fonctions d’une entreprise. Un patron amical, proche de son monde, qui ne fait pas de discipline… Toutefois, ce patron « fantasmé » ne convient pas toujours au monde réel. Et certains employés peinent à faire la transition dans un rôle de direction.
C’est ce que m’expliquait la psychologue du travail Diane Brunelle, lors d’un échange amorcé sur LinkedIn et poursuivi par téléphone:
Certains employés ont souffert d’avoir eu un mauvais patron et se disent : moi, je ne serai jamais comme ça. Ou alors, il y a des gestionnaires qu’ils admirent et prennent comme modèle. Mais ces gestionnaires ne sont pas toujours adéquats. Il y a des gestionnaires qui n’ont pas le bagage théorique pour savoir comment réagir dans certaines situations. »
D’autres, encore, ont un problème avec la notion d’autorité ou ont en horreur toute forme de politiques formelles, qu’ils associent à la bureaucratie. Cet état d’esprit peut compromettre la progression d’un dirigeant ou d’un manager:
Quand une petite entreprise obtient un gros contrat et qu’elle voit la taille de son personnel doubler du jour au lendemain, on ne peut plus fonctionner de la même façon. On doit formaliser les pratiques de ressources humaines. C’est important de se donner une structure, de mettre les choses par écrit et d’officialiser certaines politiques. Des dirigeants ont beaucoup de difficulté avec cette transition. »
Pour commencer, un examen de conscience
Comment faciliter cette transition ? Et surtout, comment faire le deuil du patron « que l’on voulait être » pour adopter de saines pratiques de gestion ? La première étape est de défaire les croyances entretenues par les dirigeants, en leur faisant voir les conséquences que peut avoir le laisser-aller :
Quand on dit que l’on va s’arranger au cas par cas, explique Diane Brunelle, on ne se rend pas compte de l’insécurité que ça crée chez les employés qui, eux, ont besoin de savoir à quoi s’en tenir pour s’épanouir dans l’entreprise. »
Beaucoup de patrons détestent en effet la discipline.
Là encore, ils ne mesurent pas les conséquences d’un employé aux comportements toxiques sur les collègues directs qui l’entourent et doivent endurer ses écarts de conduite sur une base quotidienne. Quand on leur fait voir cela, ça les convainc de changer leur approche. »
Des compétences qui s’apprennent
Finalement, le rôle de dirigeant ou de manager est un métier qui s’apprend.
Certains gestionnaires ne sont pas à l’aise avec les mesures disciplinaires, illustre la psychologue. Ils ne savent pas comment s’y prendre, ils ont peur de faire une erreur et d’être poursuivis, ils ne savent pas comment l’employé réagira et ils ne savent pas comment se préparer. Mais ce sont toutes des compétences qui se développent. »
Avec la bonne préparation, le manager devient à l’aise d’intervenir au moment opportun. C’est un apprentissage qui se fait pas à pas, rappelle cependant la psychologue du travail :
Le fait de vivre des succès, puis de constater les effets positifs des nouveaux comportements qu’elle adopte, ça encourage la personne à changer. »