Eva Nineuil apporte un supplément d’âme à l’hôtellerie de luxe Reviewed by La Rédaction on . 5 juin 2019 Nous vous proposons sur Isarta Infos le portait d'Eva Nineuil, une Française expatriée en Californie qui tente de réinventer le marketing hôtelier. 5 juin 2019 Nous vous proposons sur Isarta Infos le portait d'Eva Nineuil, une Française expatriée en Californie qui tente de réinventer le marketing hôtelier. Rating: 0

Eva Nineuil apporte un supplément d’âme à l’hôtellerie de luxe

5 juin 2019

Nous vous proposons sur Isarta Infos le portait d’Eva Nineuil, une Française expatriée en Californie qui tente de réinventer le marketing hôtelier. Zoom sur sa success story. 

Eva Nineuil, Française de 32 ans basée à Los Angeles, a fait ses armes auprès de grandes maisons telles que celle d’Alain Ducasse, où elle s’est occupée de la création de nouveaux concepts de restaurants, et a enchaîné auprès de grands chefs californiens, puis des groupes hôteliers.

Repérée pour sa sensibilité artistique, l’experte du secteur de l’hospitalité, à l’œil artistique bien aiguisé, vient d’être appelée par le groupe Proper, une chaine américaine lifestyle haut de gamme, pour transformer les hôtels du groupe en véritables ‘hubs culturels’.

Nous avons interrogé cette créative, spécialiste du marketing dans l’hôtellerie et de la restauration, pour mieux comprendre sa stratégie marketing, et décoder les tendances marketing actuelles de l’hôtellerie de luxe. Entrevue.

Pouvez-vous nous expliquer votre rôle au sein du groupe Proper ?

Eva Nineuil : Je suis Directrice de la programmation culturelle pour le groupe. Mon objectif est de faire vivre aux hôtes de cette chaîne d’hôtels une vraie expérience client au-delà des prestations traditionnelles haut de gamme de l’hôtellerie de luxe, que sont une chambre confortable, le room service, ou le spa.

Nous faisons face à une nouvelle génération d’hôtes très préoccupés par leur qualité de vie, du temps qui passe, désireux de vivre une vie extraordinaire. Je m’occupe donc de tous les aspects qui vont contribuer à faire vivre à ces hôtes une expérience de marque unique dans ces hôtels.

On retrouve d’ailleurs cette tendance d’expérience de marque dans de nombreuses industries comme par exemple l’événementiel sportif (il ne s’agit plus de courir un semi-marathon mais de vivre une expérience), la distribution (il ne s’agit plus de s’acheter un short Nike, mais de vivre une expérience en magasin), ou le voyage (Airbnb a développé son service Expériences, permettant aux voyageurs d’agrémenter leur séjour d’expériences locales (ateliers, activités, etc.).

Comment s’exprime cette notion dans le secteur de l’hôtellerie ou la restauration ?

E.N. : L’hospitalité (restauration-hôtellerie) n’échappe pas à la tendance. Que l’on aille prendre un café, boire un verre dans un bar, dîner au restaurant, ou que l’on séjourne dans un hôtel, il s’agit de vivre une expérience.

Le café doit proposer des workshops créatifs avec tel artiste de composition florale, ainsi qu’une mini boutique de produits, le bar doit proposer une série de cocktails spéciaux créé par une agence de cocktails, signés chacun par des influenceurs bien en vue, le restaurant doit proposer tout un univers allant du service au contenu de l’assiette, en passant par la déco, et l’hôtel doit habiller son staff avec des uniformes dessinés par le dernier designer à la mode. Où que l’on aille, il doit se passer quelque chose.

La notion de marque est donc aussi devenue un point d’entrée dans l’hôtellerie lifestyle. Pour asseoir un positionnement de marque, il faut faire exister la marque en question par un rayonnement culturel, des valeurs, une communauté.

Cela se fait d’abord par la sélection des bons partenaires lors de la création d’un hôtel pour délivrer l’expérience souhaitée et faire passer le message voulu: une agence pour créer un environnement sonore dédié à l’hôtel, ou l’éclairage, une agence spécialisée la création de cocktails, des photographes spécialisés dans la mise en avant d’hôtel, un prestataire spécialisé dans la création d’uniformes sur mesure pour le staff, etc.

Cela passe ensuite par la mise en place d’une programmation culturelle et artistique, qui fait vivre au quotidien la marque, et permet de créer une communauté de gens qui s’identifie à la marque pour ce qu’elle propose. Par ses choix en matière de design et de programmation, l’hôtel devient alors à son tour un KOL (Key Opinion Leader), voire un média.

Expliquez-nous concrètement quels types d’expériences sont proposées aux hôtes dans le cadre d’une programmation culturelle et artistique ?

E.N.: Nous mettons l’accent sur le bien-être dans toutes ses formes. Clé de voute de la vie en Californie, le bien-être est d’ailleurs un état d’esprit ici.

Quoi de plus beau et de plus relaxant que de vivre une séance de coaching et de méditation sur un paddle en plein océan ou de s’initier au surf aux côtés d’un célèbre surfeur professionnel de Malibu ?

Ou de faire une séance de méditation dans un bain sonore. Les bols sonores sont accordés sur le son vibratoire de chaque chakra, ce qui permet d’atteindre un état de conscience plus profond. Cette expérience sonore de bols tibétains avec ses carillons aide à se plonger dans un voyage relaxant. On en ressort destressé et renouvelé.

Pour continuer cette expérience des sens et de bien-être au sein de l’hôtel, nous proposons aux hôtes d’explorer les principes de bien-être des indiens séculaires, avec un Spa ayurvédique. Cette pratique peu connue combine un massage thérapeutique, des traitements à la vapeur et à l’huile, la cuisine, le yoga, la méditation et les programmes Panchakarma de 3 à 28 jours conçus pour nettoyer et rétablir l’équilibre du corps, de l’esprit et des émotions. On en sort nourri, guéri, le tout dans un cadre californien propice à la sérénité.

Nous allons même mettre en place la livraison de CBD pour les hôtes de l’hôtel qui en ferait la demande. Le cannabis a été légalisé l’an dernier en Californie, et le CBD en est le composant relaxant.

Nous mettons aussi en place un certain nombre d’activités ou moment culturels, permettant de favoriser la création d’une communauté : talks inspirants d’entrepreneurs, d’environnementalistes, d’organisations pour l’empowerment des femmes, panels sur la créativité, dédicaces d’auteurs, résidence périodique de musiciens, chanteurs ou DJs, animant les différents espaces de l’hôtel, événements culinaires, dégustations de vins, etc.

Comment communiquez-vous sur cette programmation ?

E.N. : Nous avons bien sûr recours aux canaux habituels de la communication : réseaux sociaux, emailing, site web, agences PR, influenceurs.

Nous nous appuyons aussi sur le réseaux de partenaires auxquels nous sommes connectés pour parler de toutes les activations qui se déroulent dans les hôtels du groupe : un auteur fera lui même la promotion de sa séance de dédicace, un groupe de musique annoncera sa date dans un de nos hôtels via ses propres plateformes, un professeur de fitness communiquera sur son cours à venir dans un hôtel Proper, etc.

Enfin, nous mettons en place une série d’outil digitaux pour communiquer au jour le jour auprès des hôtes sur le programme culturel proposé, en particulier via une communication dédiée par SMS, tout au long de leur séjour.

Mais l’objectif ultime est de ne pas avoir à communiquer ! Il faut que les hôtes ou visiteurs choisissent d’aller dans un hôtel Proper parce que justement ils savent que quelque chose s’y passe, et qu’un contenu en ligne avec leurs attentes les y attendra, dans tous les cas.

Au delà de la création d’une marque et d’une communauté, quels sont les bénéfices concrets pour un groupe hôtelier de l’outil marketing qu’est la programmation culturelle ?

E.N. : La programmation engendre de la communication, organique ou virale (presse, réseaux sociaux), donc de la visibilité, qui génère du trafic au sein de nos propriétés, et qui elle-même engendre des revenus food & beverage au sein des différents bars et restaurants de nos hôtels.

On aurait tendance à penser que la programmation est une source de coûts, mais c’est en réalité une vraie source de revenus à part entière. Sans parler de la valeur intangible que cela apporte à l’image de marque (la brand equity), et qui apporte de la récurrence dans la fréquentation des hôtels.

Cela permet aussi d’attirer une population sensible à la marque, plutôt aisée, moins regardante sur les prix des chambres.

Est-ce une tendance qui se développe dans toute l’industrie de l’hôtellerie de luxe ?

E.N. : Attention, il faut distinguer l’hôtellerie de grand luxe, comme les palaces, de l’hôtellerie de luxe lifestyle. Il ne s’agit pas des mêmes clients ; les attentes sont différentes.

Dans le grand luxe, tout est tiré au cordeau, et la discrétion est de mise, aucun écart n’est permis, le niveau d’exigence est très élevé, tant au niveau de la clientèle que dans les personnel hôtelier.

Dans l’hôtellerie lifestyle, l’exigence est tout aussi élevée, mais les hôtes attendent un supplément d’âme. L’exigence porte sur le contenu proposé, et c’est presque plus difficile à mettre en oeuvre.

Il faut toujours être en mouvance, se réinventer, se différencier, répondre aux attentes d’une communauté; en tant que leader d’opinion, un hôtel est plus regardé, attendu. Le pur luxe, lui, est plus figé.

Vous êtes française et venez du secteur de la gastronomie et de la restauration ; votre nationalité et votre expertise ont-ils été un atout de self-marketing en soi pour vous imposer aux Etats-Unis ?

E.N. : Le rayonnement culturel de la France n’est plus à démontrer (gastronomie, mode, luxe, cinéma, chercheurs, langue); on parle du Soft Power de la France.

Par capillarité, les Français à l’étranger bénéficient d’une aura en matière culturelle. Le simple fait d’être Français confère une légitimité, un droit à l’expression.

Pour ma part, ce sont mon parcours dans l’hospitalité au côté de grands noms, ma connaissance de l’industrie de la restauration et de l’hôtellerie, ainsi que ma créativité, qui sont valorisés.

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