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Les médias sociaux sont-il vraiment une « tare » ?

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«Croire que les médias sociaux peuvent générer une quelconque dépendance, c’est leur accorder
beaucoup trop de pouvoir», dit Camille Alloing, chercheur en communications numériques à l’UQAM.

9 février 2024

Ces dernières années, les médias sociaux ont été accusé de tous les maux. Notamment du fait de créer une « dépendance », de par les mécanismes déployés pour capter et retenir notre attention «à tout prix». Or, Camille Alloing, chercheur en communications numériques à l’UQAM (Université du Québec à Montréal) et auteur du livre Le Web affectif: une économie numérique des émotions, rejette cette thèse. Nous nous sommes entretenus avec lui, pour mieux comprendre l’état de la recherche actuel sur les médias sociaux.

Voici un premier constat:

Dans mes travaux, je ne vois pas de dépendance au sens neurophysiologique ou psychologique du terme. Croire que les médias sociaux peuvent générer une quelconque dépendance, c’est leur accorder beaucoup trop de pouvoir. C’est plutôt qu’elles répondent de manière directe ou indirecte à des besoins – que ce soit celui de socialiser, d’aimer, de s’indigner, ou, au contraire, de se distraire et de penser à autres choses que l’actualité. »

Le professeur insiste sur les mécanismes en jeu sur les plateformes. Ce qui font leur succès, c’est le fait de déployer un arsenal de fonctionnalités (le bouton J’aime, les émojis, les partages et les commentaires) nous permettant de communiquer notre ressenti et nos émotions.

Les plateformes ont la capacité de générer en nous des réactions affectives qui nous poussent à partager des contenus avec les autres. Et ça répond à un besoin [fondamental] que nous avons. Nous avons besoin d’aimer, de s’indigner, d’être en colère et nous avons surtout besoin de créer des connecter avec les autres. »

D’ailleurs, de par ses recherches, Camille Alloing constate que la réponse « affective » transcende les cultures.

Quand on fait des analyses qui comparent différentes cultures, que ce soit dans le monde occidental, entre le Québec et la France, entre les États-Unis et l’Allemagne, on s’aperçoit que si la manière de s’exprimer change, l’intensité affective reste la même. Parce que c’est une intensité affective qui est valorisée par les plateformes. L’attention ne va pas nécessairement à celui qui « parle le plus fort », mais à celui qui trouvent les mots, les sons et les images qui créent une réaction affective. C’est ce que nous montrent les études. »

Instrumentalisation affective

Cela étant dit, le chercheur reconnaît un certain nombre d’effets collatéraux sur lesquels on peut se poser des questions.

Les publicitaires et les médias ont très bien compris comment utiliser les médias sociaux; ils se sont emparés de ce standard émotionnel et affectif et il y a tout un écosystème de communication qui s’est créé autour des plateformes. Or, on s’aperçoit que c’est une manière de communiquer qui est toujours très intense, d’un point de vue émotionnel. Et on peut se questionner sur l’impact de vivre dans une société où l’on débat et confronte des points de vue avec une telle intensité. »

Plutôt que d’attendre des solutions provenant des plateformes elles-mêmes, le chercheur prône une meilleure éducation du public sur l’usage des médias sociaux, ainsi qu’une plus grande législation des états.  

Il y a une vraie question de régulation à se poser au niveau collectif, tant au niveau des citoyens que des États. Il faudra réapprendre à vivre en groupe en ligne et repenser une nouvelle forme de citoyenneté numérique », conclut le chercheur.


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A propos de l'auteur

Philippe Jean Poirier

Philippe Jean Poirier est un journaliste qui se passionne pour les mots, l’écriture, la recherche, la collecte de témoignages, les tendances sociétales et les raisons souterraines qui alimentent l’actualité. Email: pj_poirier@isarta.com

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