Quand LinkedIn devient le lieu de dénonciation des «mauvaises pratiques» de gestion
22 juillet 2021
Les langues se délient de plus en plus sur LinkedIn. Par souci d’authenticité, les utilisateurs de cette plateforme puisent dans leur vie personnelle et professionnelle pour créer du contenu pertinent. Dans la foulée de #moiaussi et #BlackLivesMatter, on voit de plus en plus d’utilisateurs dénoncer des mauvaises pratiques de gestion sur LinkedIn. En ouvrant leur jeu ainsi, ces professionnels risquent-ils de s’aliéner de futurs employeurs? Nous avons posé la question à un consultant en gestion et une coach de carrière.
Olivier Fortier, cofondateur de la plateforme de contenu Go Pyrate!, s’est fait un nom sur LinkedIn en dénonçant les mauvaises pratiques de gestion d’employeurs québécois.
Il frappe fort, et il frappe là où ça fait mal, en dénonçant des pratiques de sexisme, de microgestion abusive ou autres comportements toxiques. En voici un exemple qui a beaucoup fait réagir :
Les interventions sont faites sans nommer d’entreprise, ni de gestionnaires. Et surtout, les dénonciations visent des « pratiques» et non des individus.
Toutefois, le consultant en gestion agile reconnaît qu’il faut agir avec prudence :
Ce qu’on écrit sur Internet laisse une empreinte numérique. C’est lié à notre nom et ça peut être difficile à effacer par la suite. »
Il donne l’exemple d’un utilisateur LinkedIn qui a nommé ET taggé un ancien employeur en commentaire sous une publication de GoPyrate!.
J’ai écrit à cette personne en privé pour m’assurer qu’elle comprenait les implications d’une telle publication. »
Combattre les cultures toxiques… sans se mettre à dos un futur employeur
Depuis deux ans, le contexte de dénonciation publique entourant les mouvement #moiaussi ainsi que #BLM (La Vie des Noirs compte) semble avoir délié les langues de plusieurs professionnels LinkedIn, qui, avec les meilleures intentions du monde, dénoncent des comportements ou des pratiques toxiques d’anciens employeurs.
Or, il y a lieu de se demander si de telles critiques peuvent avoir pour effet de refroidir de futurs employeurs ? Olivier Fortier comprend l’enjeu. Toutefois, il doute que les employeurs aient le temps de passer au tapis les commentaires de chaque candidat.
Je peux donner mon exemple personnel : je suis actuellement consultant sur différemment mandats et mes clients n’ont absolument aucune idée que je fais le podcast Go Pyrate! et que je publie régulièrement sur LinkedIn. Je n’ai pas fait d’étude sur le sujet, mais j’ai l’impression que les entreprises qui embauchent n’ont pas vraiment le temps de lire chaque intervention d’une personne sur LinkedIn. »
Trouver le bon ton
Depuis le début du projet Go Pyrate!, Olivier Fortier dit avoir ajusté le ton de ses interventions aussi bien dans le podcast que dans les publications LinkedIn. Les joyeux pirates se sont éloignés de la dénonciation tous azimuts, pour adopter une approche davantage axée sur les solutions.
Ce changement est venu à la suite de réactions de notre auditoire – qui ne voulait pas seulement se conforter dans le fait de reconnaître une mauvaise pratique, mais qui voulait aussi savoir comment améliorer sa situation. Notre storytelling est basé sur des choses épouvantables qu’on a vues. Mais, ensuite, on va proposer des solutions pour se sortir d’une impasse. »
Le consultant rappelle que la mission de Go Pyrate! est de « donner des outils pour que les professionnels ne soient plus prisonniers de leur contexte de travail et de favoriser l’émergence d’entreprises progressistes ».
Rester positif, malgré tout
Caroline Maltais, directrice de Propulsion carrière, voit deux côtés au fait de commenter ainsi les pratiques de gestion d’un ancien employeur.
Si plusieurs avis sont négatifs sur un employeur, ça aide le chercheur d’emploi par la suite à trouver un employeur de qualité. Il faut faire attention aux mots et à ce qu’on dit en général, car, effectivement, cela peut venir nous mordre par la suite. »
Lorsqu’on intervient sur un média social comme LinkedIn, Caroline Maltais rappelle un judicieux conseil : s’en tenir à son expertise.
Il faut faire attention à notre image. Il faut se montrer positif dans nos interventions, et si possible éviter la controverse… C’est également préférable de donner des points de vue en lien avec notre champ d’expertise. Donner son opinion à tout vent nous fait paraître éparpillé et mal habile. Le bon jugement est de mise!», conclut-elle.